Les Land Rover du SAS

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Les Land Rover du SAS

Message par Rob1bureau » 31 Mai 2008, 07:22

Derrière les lignes

Les Land Rover du SAS ont atteint un statut légendaire parmi les véhicules militaires, et leur histoire remonte aux premières campagnes du désert de l'après-guerre.

par Bob Morrison, Land Rover Monthly, janvier 2002



Après le troisième week-end d'octobre, suite aux missions de l'US Special Operations Command en Afghanistan, les journaux télévisés ont présenté des prises de vues nocturnes de Land Rover sortant de l'arrière d'hélicoptères Chinook. Ce film fut, bien entendu, pris pendant un exercice d'entraînement et non pendant l'opération Liberté Immuable, mais c'est la première fois que l'on ait pu voir une vidéo des Defender version Rangers Special Operations Vehicle (R-SOV) telles que présentées dans les éditions de novembre 1999 et janvier 2001 de LRM [Land Rover Monthly].

Les R-SOV ne furent pas utilisés pendant cette première opérations des Rangers, mais il ne fait pas de doute qu'ils sont cachés quelque-part à proximité pour un futur usage. Il est aussi probable que leur équivalent britannique, la flotte de véhicules de patrouille désertique (Desert Patrol Vehicle, DPV) 110 du SAS est aussi en attente avec les pleins faits.

Il y a soixante ans, ce qui devait devenir la meilleure unité de combat au monde fut formé pour attaquer le puissant Africa Korps allemand où et quand ils s'y attendaient le moins. Conçut par un jeune officier de l'armée britannique, qui à l'époque se rétablissait dans un hôpital égyptien, the Special Air Service (SAS) était un petit groupe de commandos hautement motivé. Ils s'entraînaient à sauter en parachute loin derrière les lignes ennemies pour attaquer des objectifs stratégiques puis disparaître dans les sables du désert, pour être ensuite ramassés par les camions du Long Range Desert Group.

L'opé spéciale US spectaculaire près de Kandahar le 20 octobre est l'équivalent moderne de ces premiers raids du SAS, bien qu'en cette occasion les troupes aient été récupérées par des aéronefs plutôt que par des véhicules en raison des grandes distances impliquées.

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Bien que certaines de leurs premières opérations aient été moins que réussies, le SAS de la Seconde Guerre mondiales établit rapidement une réputation d'être capable d'effectuer des missions d'une audace incroyable. L'effet qu'elles commençaient à avoir sur le moral de l'ennemi augmenta hors de proportion avec leur nombre, à tel point que Hitler décréta que tout soldat SAS capturé devait être exécuté sur le champ.

Soixante ans plus tard, le 22e Régiment du Special Air Service perpétue les traditions de la bande d'hommes de David Stirling. A l'heure où ces lignes sont écrites, on suppose qu'ils sont actifs dans des opérations quelque-part dans la région de l'Afghanistan, si ce n'est à l'intérieur même du pays. Ils opèrent aussi en Bosnie, Macédoine, Sierra Leone et d'autres pays.

D'ailleurs, il a même été rapporté que, fin octobre, les États-Unis ont demandé à la Grande-Bretagne d'engager un partie significative du régiment dans les opérations en Afghanistan, en raison de la haute estime qu'ils ont pour eux. Même la Delta Force, la meilleure des unités de forces spéciales de l'Amérique, fut créée selon les grandes lignes du SAS après que son fondateur, le colonel Charlie Beckwith, ait passé une année en Grande-Bretagne avec eux comme officier d'échange.

En 1942, le SAS originel avait réalisé qu'il avait besoin de son propre moyen de transport pour lui permettre d'opérarer indépendament du LRDG qui, après tout, avait ses propres missions à effectuer en plus de jouer les chauffeurs de taxi du désert. Ils se tournèrent vers la nouvelle (à l'époque) Jeep, comme une solution possible à leur problèmes de transport.

Elle était à la fois assez légère pour l'utiliser en terrain sableux où les lourds camions Chevrolet du LRDG auraient des difficultés, et elle pouvait porter assez d'armes, de munitions et de carburant pour leurs besoins.

Petit et rapide

Contrairement au LRDG, le SAS ne passait pas de longues périodes en patrouille dans le désert, mais lançait des attaques-éclair puis s'enfuyait aussi vite que possible, ce qui explique que la petite taille des Jeep n'était pas un problème. Cependant, lorsqu'ils eurent ajouté une pléthore d'armes et de nombreux jerrycans sur chaque véhicule, ces équivalents désertiques d'une charette de ferailleur étaient bien au-dessus de leur charge maximale; mais elles firent leur boulot.

Suite aux succès de la campagne d'Afrique du Nord, le SAS fut redéployé pour la campagne d'Italie et en 1944 une partie de son personnel fut envoyée derrière les lignes allemandes en France pour soutenir le débarquement de Normandie. Pendant les quelques mois suivants, de petits groupes de soldats SAS, se déplaçant souvent avec des Jeep armées de mitrailleuses qui avaient été parachutées avec eux, rejoignirent les mouvements de Résistance français, belges et hollandais, pour attaquer l'armée d'occupation allemande là où elle s'y attendait le moins.

A cette époque les Jeep du SAS avaient été modifiées avec des réservoirs à grande capacité et des blindages pour le conducteur et le mitrailleur frontal, et certains de ces kits furent par la suite transférés aux Land Rover Minerva utilisées par le SAS belge après la guerre, mais c'est une autre histoire. Les Jeep du SAS britannique, comme le SAS lui-même, furent considérés comme des surplus, mais cela devait s'avérer être une vision à court terme.

En 1951, en riposte à l'insurrection communiste en Malaisie, le SAS fut re-créé. Son rôle principal était de faire la guerre aux terroristes en se déployant loin dans la jungle pour de longues périodes pour les traquer, attaquer leurs bases et couper leurs lignes de communications.

Des véhicules dédiés étaient de peu d'utilité dans cette guerre de jungle, ou par la suite dans la campagne de Bornéo mais, à la fin de la décennie, le SAS fut aussi impliqué à Oman, où le terrain était plus adapté aux opérations en véhicules. A ce moment, le SAS avait une petite flotte de Série I armées de manière similaire à leurs Jeep de la Seconde Guerre mondiale.

Ces Land Rover 1957 lourdement armées, construites sur les derniers châssis à empattement de 88 pouces, transportaient trois hommes plus l'équipement de communications. Le commandant s'asseyait à la gauche du conducteur sur un siège surélevé, et était armé de deux mitrailleuses jumelées Vickers tirant vers l'avant montées au-dessus du tableau de bord. L'opérateur radio s'assayait au milieu du compartiment arrière, regardant vers l'arrière avec sa radio à sa gauche et une mitrailleuse lourde de calibre .30 devant lui pour couvrir l'arrière. Même le conducteur avait une mitrailleuse, montée sur le pivot de sa porte.

Ces Land Rover Série I du SAS étaient OK pour des opérations à courte distances, mais les déserts et plaines côtières d'Oman, où le régiment était lourdement impliqué dans une guerre secrète, et le terrain étendu à proximité d'Aden, qui devenait une zone chaude alors que l'Empire britannique s'écroulait, exigeaient des véhicules d'une charge utile plus élevée. La Série IIA 109 à long empattement, désormais largement utilisée par l'armée, semblait être le véhicule idéal pour ce boulot.

Comme les Série I, la 109 pouvait être gréée pour transporter trois hommes et surmontée de mitrailleuses. Sa charge utile augmentée et sa caisse plus grande permettaient de monter d'importants réservoirs d'essence et de transporter bien plus de munitions.

Après beaucoup d'expérimentations, y compris la conversion de Land Rover militaires standard, une version définitive fut formulée et la 109 « Panthère Rose » était née. Cette flotte, dont le surnom vient de l'inhabituelle peinture rose appliquée aux véhicules pour les opérations dans le désert, entra en service en 1967. Elle opérerait pendant les deux décennies suivantes jusqu'à ce qu'elle soit remplacée par le DPV Un-Dix.

Comme la large majorité des Pinkies, comme elles seraient par la suite surnommées, finirent sous ce camouflage désert à un moment de leur carrière, on croit souvent qu'elles étaient toutes peintes en rose et qu'elles ne servirent que dans le désert. Aucune de ces suppositions n'est vraie.

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On n'a pas encore établit si chacune d'entre elles commença sa vie sous la couleur Vert Bronze Foncé, mais il est certain qu'un grand nombre le fit, le camouflage rose étant peint à une date ultérieure. Certains restaurateurs affirment qu'il n'y a aucune preuve que leurs Pinkies (dont un nombre considrable existe toujours aux mains de propriétaires privés) aient jamais été peintes en vert, mais j'ai été dans le journalisme militaire depuis bien trop longtemps pour jamais dire jamais.

Je sais de mon expérience passée que, un jour, une paperasse originale fera surface pour réfuter toute erreur de ma part, donc je ne tenterai pas le destin. En ce qui concerne les véhicules « pour le service désertique seulement », nous pouvons tordre le cou à cette idée en confirmant qu'elles ont servi dans les pays tropicaux du Bélize et de Brunei, sans parler des déploiments près de la frontière entre les deux Allemagnes où, dans tous les cas, une peinture rose clair ressortirait du paysage comme un objet marron sur une table de billard. Les Land Rover Série IIA du SAS entrèrent en service à une époque où l'armée britannique était encore engagée dans la monde entier. Cependant le terrorisme international ne tarderait pas à focaliser l'attention et le rôle du SAS ne tarderait pas à s'étendre pour le contrer.

Il ne fait pas de doute que les Panthères Roses prirent part à des opérations militaires actives quelque-part entre 1967 et leur remplacement au milieu des années 80, avec la campagne du Dhofar à Oman étant la possibilité la plus évidente. Cependant, le secret entourant le SAS a empêchée qu'aucune photo opérationnelle des Pinkies soit apparue à ce jour. Si quelqu'un peut confirmer l'utilisation de ces véhicules où que ce soit, y compris lors d'exercices dans les habituels repaires d'entraînement qu'a le SAS en temps de paix autour du monde, nous serions ravis de l'entendre. *

Le DPV Un-Dix (dans les séries ##KD##) qui remplaça les Pinkies originelles, est nettement moins timide face aux appareils photo que son grand frère. De nombreuses photos de la guerre du Golfe ont fait surface pendant la dernière décennie. Comme la Série I originelle, l'ado de la famille Land Rover du SAS a aussi un équipage de trois hommes et est lourdement armé, mais il a une charge utile quatre fois supérieure (officiellement - en réalité toutes les Land Rover de combat sont lourdement surchargées). Il a des capacités qui stupéfieraient le conducteur SAS d'il y a trente ans.

Propulsé par un moteur à essence V8 et équipé d'une suspension hélicoïdale au lieu des ressorts à lames utilisés sur les Série I, il était capable de pénétrer profondément en territoire ennemi dans des conditions désertiques comme son prédescesseur de 1942, mais avec un niveau de confort inimaginable pour les héros de la Seconde Guerre mondiale, à une vitesse dont ils n'auraient jamais rêvé et sur des distances inimaginables. Les colonnes de combat de DPV SAS de la guerre du Golfe en 1991 devaient passer littéralement des semaines derrières les lignes ennemies.

Au départ le général Norman Schwarzkopf, commandant des forces multinationales de la Coalition, ne tenait pas excessivement à impliquer les forces spéciales, mais, après avoir été persuadé de laisser le SAS participer, il changea rapidement d'avis. Les forces spéciales US aussi devinrent impliquées.

Un des résultats de la coopération qui s'en suivit entre les spécialistes britanniques et américains fut que les Yankees réalisèrent que la Land Rover était meilleure que le Humvee (Hummer) pour l'infiltration par hélicoptères et l'intervention rapide. Peu après la guerre du Golfe, les Rangers US spécifièrent la Land Rover comme véhicule de choix pour leurs escouades d'assaut d'intervention rapide.

Pendant la guerre du Golfe, un certain nombre de Land Rover DPV fut endommagé sans réparations possibles, et au moins une fut délibérément détruite pour que les Irakiens ne mettent pas la main dessus après qu'elle se soit retournée en traversant un oued dans l'obscurité. Les taux d'attrition lors de divers exercices ont aussi pris leur tribut sur la petite flotte, avec pour résultat une commande pour un petit lot de remplacements, apparement équipés du moteur diésel Tdi.

Générallement, ces véhicules suivent la même configuration que le lot original de DPV Un-Dix, avec trois postes d'équipages, siège du commandant surélevé et montage de mitrailleuses devant le commandant et l'opérateur radio, mais l'observateur attentif remarquera des différences de détails mineurs. La dernière sortie opérationnelle confirmée du DPV était en Sierra Leone en 2000.

Contrairement aux Land Rover SAS précédentes, la flotte à suspension hélicoïdale a eu divers camouflages au cours des années. Les premières arrivèrent au dépot central de véhicules dans l'ouest de l'Angletterre dans une peinture uniforme verte mat OTAN, mais qui fut rapidement recouverte d'une teinte beige clair, appelée « pierre », si les véhicules étaient envoyés en exercices outre-mer en Afrique ou dans la région du Golfe Persique.

Pour un tel exercice africain en 1987, certaines furent peintes dans un motif inhabituel en tiger stripes (« rayures de tigre ») beige, pierre et vert foncé, mais il ne semble pas avoir eu beaucoup de succès. En 1990, le beige et gris semble avoir été en vogue, les zones grises contenant du gravier qui donnait une apparence très rugueuse et qui peut avoir été expérimentale.

Quelques-uns des véhicules légers d'attaques (Light Strike Vehicles) type buggy, qui ne furent pas un succès, et des motocyclettes SAS de cette période furent aussi peints en pierre et gris. Cependant, bien que certains DPV utilisés dans la guerre du Golfe semble avoir été pierre et gris, au moins quelques-uns d'entre eux avaient leurs taches grises repeintes dans une teinte rosée qui rappelait les Panthères Roses originelles. C'est peut-être la peinture utilisée sur les hélicoptères Sea King, mais elle fut clairement appliquée au pinceau plutôt qu'au pistolet à peinture, ce qui pourrait expliquer qu'elles étaient considérablement plus foncées que sur l'aéronef.

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La dernière variante de Land Rover SAS dont j'ai connaissance, mis à part le petit lot de Defender 90 diésels armés improvisé pour escorter le convoi de ravitaillement SAS de la guerre du Golfe, est celle vue en Sierra Leone l'année dernière et qui était présentée dans l'édition d'août 2000. A cette époque je spéculais qu'elle pouvait être une du lot à moteur Tdi qui était entré en service juste après la guerre du Golfe, mais maitenant je ne suis plus si sûr. Je pense toujours que c'est une version diésel, mais je soupçonne que cela puisse être un véhicule configuré pour être expérimenté ou testé plutôt qu'une conversion d'un des véhicules de la série ##KK##.

Comme toujours lorsqu'on parle de choses du SAS, il est très difficile d'avoir une réponse directe aux questions en raison du degré apparement nécessaire de confidentialité qui doit être maintenu sur la plupart des détails opérationnels. Cependant, assez d'éléments sont apparus pour me faire douter de mon estimation initiale. Je soupçonne qu'il puisse passer quelques temps avant que plus d'infos emmergent.

Désormais plus assez gros

Comme je l'ai brièvement mentionné dans mon articles Fin en vrac dans le LRM du mois dernier, il semble probable que les plus de quarante ans de service de la Land Rover au SAS tirent à leur fin avec le remplacement du DPV Un-Dix par un véhicule plus grand capable d'afronterdes terrains plus difficiles. D'après ce que j'ai glané du peu de documentation officielle concernant ce que l'on croit être un contrat pour le successeur du DPV Un-Dix, un véhicule avec une masse tout compris de plus de cinq tonnes est demandé.

Il est clair qu'un Land Rover 4x4 conventionnel avec un châssis et un transmission standards ne peut convenir à cette demande tout en continuant à fournir un bon degré de mobilité et une grande vitesse sur route, il est donc irréel de lui demander de le faire. Comme Land Rover est un gros fabricant de voitures, plutôt qu'un constructeur de véhicules militaire sur mesure, c'est seulement une question de temps avant que le SAS ne doive aller chercher ailleurs que dans le catalogue du constructeur. Néanmoins, quelque-chose de l'ordre de quarante-cinq ans de service continu chez les forces spéciales est toujours quelque-chose dont on peut être fier.

La descendance de la Land Rover du SAS peut toucher à sa fin, bien que je m'attende à ce que quelques DPV continuent à servir encore un moment, mais la marque a déjà gagné un record inégalé de réussite dans un domaine d'élite.

Il faudra beaucoup de temps avant que la mémoire des Panthères Roses s'éteigne. Les restaurateurs de véhicules, les collectionneurs et les conservateurs de musées, sans parler des éditeurs de magazines, s'en assureront.


* : Dans le hors-série RAIDS sur l'Irlande du Nord page 56, on peut voir une photo de SAS avec leur Land Rover lors du court et peu discret passage du D Squadron dans le pays en 1969.
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Rob1bureau
 
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Message par Riou27 » 31 Mai 2008, 08:12

Très bon article rob1bureau, comme d'habitude fait avec grand serieux!
Merci! PDT_Armataz_02_17
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Riou27
 
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Message par Riou27 » 03 Juin 2008, 07:06

Superbes photos, merci phil642 PDT_Armataz_02_02 !!!
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Riou27
 
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