par Dinosaure » 19 Jan 2006, 20:23
Khiram,
Ainsi que ton post le fait implicitement sentir, le mot terrorisme a la même racine que le mot terreur. Est-ce à dire que qui veut (intention des exécutants) répandre la terreur est automatiquement un terroriste ? Si oui, je ne pense pas qu'il y ait un seul Etat au monde qui puisse échapper à cette définition. Prenons le cas des Etats-Unis : en larguant deux bombes nucléaires sur Hiroshima puis Nagasaki, il s'agissait bien de répandre la terreur dans l'archipel nippon pour dissuader les Japonais de continuer le combat. Et puis tous les Etats nucléaires ont bel et bien institutionalisé la terreur à grande échelle sous la dénomination de dissuasion nucléaire. Donc la France est un Etat terroriste. Non, diras-tu offusqué ! Et poutant, c'est bien l'Etat français qui a tué un journaliste en coulant le Rainbow Warrior.
Ca ne te rappelle rien, ce genre d'opération ? Voilà, tu y es : l'USS Cole ! Et la République française est bel et bien fille d'une période de terreur que nos livres d'histoire, si je me souviens bien, appellent justement la Terreur. Je ne suis pas un expert de cette période mais il me semble que certaines atrocités commises au nom de la survie de la Révolution (Liberté, Egalité, Fraternité) valent bien les clous rouillés trempés dans du sang contaminé à l'hépatite B.
D'autres exemples ? Durant la Deuxième Guerre mondiale, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne étaient du bon côté. Cela ne les a pas empêché d'avoir recours à la terreur en rasant des villes allemandes, Hambourg en tête, pour "briser l'esprit de résistance de la population allemande". Pour moi, ceux qui ont ordonné ces bombardements aveugles sont à ranger dans la même catégorie que ceux qui CHOISISSENT leurs victimes CIVILES. Peut-être même sont-ils pires : les conséquences de leurs décisions se chiffrent en milliers de morts et non en dizaines de morts. Et ceux des Allemands qui ont vu leur peau partir en lambeaux sous l'effet des bombes au phosphore avaient très certainement dans le regard la même expression de terreur que ceux qui meurent du fait des bombes posées par les insurgés irakiens ou palestiniens. De même que ceux des Irakiens innocents qui ont été torturés dans les geôles de la coalition avaient-ils aussi, dans le regard, très certainement la même expression de terreur que ceux qui ont sauté dans le vide du haut des Twin Towers lorsque celles-ci s'effondraient.
Pourquoi une telle réaction de ma part ? Peut-être, sûrement même, ai-je mal compris ton post mais en le lisant, j'ai eu l'impression, très certainement fausse, que tu étais de ceux qui considéraient que la terreur était toujours d'un côté, le mauvais s'entend, et l'angélisme démocratique toujours de l'autre, le bon s'entend. Dommage. Mon post visait justement à faire réagir les lecteurs du forum pour les inciter à penser que, justement, ce type de manichéisme était un instrument de propagande utilisé pour manipuler les foules. En serais-tu victime ? Serais-tu adepte d'un manichéisme à finalité très orientée ?
Quant à l'univers moral du soldat, de quel soldat parles-tu ? Du soldat américain ? Du soldat français ? A moins que ce soit de celui du soldat iranien ? Ou peut-être du soldat chinois ? Comme je l'ai écrit dans l'un de mes posts, évoquer la moralité, c'est implicitement faire référence à une politique, une religion ou une idéologie. Serait-ce celle, surranée, du "sabre et du goupillon" ?
Ce que l'on apprenait aux premiers commandos français entraînés en Ecosse pendant la Deuxième Guerre mondiale, c'était en priorité, justement, de laisser au vestiaire ce concept de guerre chevaleresque moralisatrice. Actuellement, des unités comme le SAS sont souvent qualifiées de "terroristes d'Etat" tant pour leurs méthodes que pour le rôle joué en Irlande. Où est, là dedans, "l'univers moral du soldat" ?
Dans le Japon ancestral, il y avait les Samouraïs et les Ninjas. Les premiers étaient censés respecter le Bushido, les seconds ne respectaient rien. Peut-on pour autant décider péremptoirement que les premiers étaient de preux chevaliers (ah, la douce moralité du suicide rituel d'un coup de sabre dans l'abdomen !) et les seconds d'affreux terroristes ? Qui étaient les plus efficaces ?
Quant à éviter les outrances dans un débat, alors autant ne pas débattre du tout. En rhétorique, l'outrance est un outil au même titre que la métaphore, la circonlocution et que beaucoup d'autres. Et c'est une tactique de rhétorique à part entière que de prétendre contraindre les autres à ne pas utiliser, dans le propos, certains des outils de rhétorique. Je revendique le droit à l'outrance tant qu'elle reste polie et respectueuse des opinions d'autrui.
Un dernier point : je respecte ton opinion même si je ne suis pas d'accord avec ce que j'ai compris de tes propos, ce qui, tu me le diras, ne correspond peut-être pas à ce que tu as voulu dire !